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23/03
2020

Covid-19 : Un langage guerrier au CMP…

Quelques jours après le début du confinement lié au covid-19, les soignants tentent d’organiser l’activité ambulatoire en fonction des annonces faites au jour le jour. Un témoignage d’Anna Mondello, infirmière en CMP.

Les Centres médico-psychologiques (CMP) sont positionnés en première ligne pour assurer l’activité ambulatoire, nous apprend-on. Cette « première ligne » de soins vaut surtout pour un maintien de l’action de s’occuper des patients, à dispenser des conseils sur les gestes barrières ou à informer sur la manière de remplir les attestations de déplacement. Au fil des journées, c’est tout autant contenir l’angoisse des patients et leur expression. Nous programmons nos entretiens autant que cela est possible par téléphone. Certaines visites à domicile (VAD) sont incontournables, de même que la venue des patients pour les injections, les piluliers ou encore pour dire leur peur. Plus que jamais, notre rôle se joue autour de la sollicitude et du soin.

Les activités thérapeutiques sont annulées et les hôpitaux de jour fermés. A notre niveau, nous contribuons à limiter la saturation des services d’urgence par des problématiques de santé mentale, en maintenant notre activité de CMP pour les consultations infirmières, médicales ou psychologiques. De permanence d’accueil infirmier lundi matin, je ne compte plus les nombreux appels de patients qui s’inquiétent de savoir si les activités thérapeutiques sont maintenues. Les appels se sont tant multipliés que je n’ai pas lâché le combiné pendant près de trois heures. Ce qui nous semble naturel, à savoir le maintien « coûte que coûte » des soins ne l’est pas forcément pour nos patients, incompréhension généralisée oblige. Ce que nous vivons est inédit.

Gestes barrières et langage guerrier…

Très vite, un véritable check point est instauré dans ce qui est devenue l’unique entrée du CMP. A chaque arrivée, les mêmes questions d’usage autour de la présence possible de température, d’un retour d’une éventuelle zone à risque et/ou d’un contact possible avec une personne infectée. La prise de température a dorénavant remplacée la traditionnelle poignée à des mains que nous enjoignons d’aller laver sitôt la porte du CMP franchie.

Le président l’a dit, nous sommes en guerre. On peut alors mieux comprendre le recours à un vocabulaire guerrier dans les points d’étapes qui nous seront fait chaque matin au cours de la semaine. Ça fait plus de vingt ans que je suis infirmière mais je n’avais que rarement entendu un tel discours. Les mots employés étourdissent. « Première ligne », « seconde ligne », « ligne de front » autant de mots que l’on entend dans des films de guerre. Au cours de cette semaine, le personnel d’encadrement recense des volontaires afin d’anticiper un redéploiement qui ne devrait pas tarder à venir. On apprend qu’en intra, dix collègues se portent volontaires pour les unités covid. Quelques-uns d’entre nous sont volontaires pour être redéployés vers l’intra. Je propose, en outre, de mon côté d’assurer des temps de supervision aux collègues en psychiatrie comme en soins généraux. Après quelques jours les besoins se font vite sentir parmi le personnel. Partout l’inquiétude grandit, d’autant que même au centre psy des patients semblent atteint par le virus.

Ce texte est paru dans la rubrique En psychiatrie à l’heure du covid-19, chronique de la vie quotidienne en psychiatrie à l’heure du coronavirus. Découvrir tous les témoignages sur Santé mentale.fr