Mission « flash » chargée d’établir un dispositif obligatoire de formation à la laïcité pour tous les agents publics
Une mission « flash » co-menée par la ministre de la Transformation et de la Fonction publique et la ministre déléguée auprès du premier ministre chargée de la citoyenneté formule des recommandations visant à structurer une offre de formation pour tous les agents publics dans le domaine de la laïcité. La fonction publique hospitalière va devoir former tous ses nouveaux personnels d’ici mi-2022 et tous ses effectifs d’ici 2024.
Rappelons que la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État est la clé de voûte de la laïcité en France. En effet, inscrite dans la Constitution, la laïcité constitue aujourd’hui un des fondements de la République française. Elle repose sur deux principes : l’obligation de l’État de ne pas intervenir dans les convictions de chacun et l’égalité de tous devant la loi, quelle que soit leur religion. Inscrite dans la Constitution de 1946 et reprise par la Constitution de 1958, la laïcité figure parmi les droits et libertés fondamentaux garantis par celle-ci, au même titre que l’égalité ou la liberté. Selon le Conseil constitutionnel (décision du 21 février 2013), résultent du principe de laïcité : le respect de toutes les croyances et l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion ; la garantie du libre exercice des cultes ; la neutralité de l’État ; l’absence de culte officiel et de salariat du clergé.
Une mission « flash » chargée d’établir un dispositif obligatoire de formation à la laïcité pour tous les agents publics
Par lettre de mission en date du 1er février 2021, la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin, et la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur chargée de la Citoyenneté, Marlène Schiappa, a confié à cette mission de formuler des recommandations visant à structurer une offre de formation pour tous les agents publics dans le domaine de la laïcité et, permettant à la fois :
• d’identifier un socle de connaissances et de réflexes communs ayant vocation à être maîtrisés par l’ensemble des agents publics ;
• de répondre aux besoins de formations spécifiques liés à l’exercice ou au lieu d’exercice de certaines fonctions ou métiers ;
• de s’assurer de son accessibilité à tous les agents publics, quel que soit leur statut, sur l’ensemble du territoire. Le caractère pratique et facilement appréhensible par les agents dans leur quotidien professionnel est déterminant.
Par ailleurs, il a été demandé d’identifier les éléments d’information et de connaissance devant figurer dans un futur guide pratique de la laïcité distribué à tous les agents publics.
« Le rapport « flash » rendu le 18 mai 2021 propose d’unifier l’offre de formation à la laïcité dans les trois versants de la fonction publique afin d’atteindre l’objectif de former tous les agents publics d’ici 3 ans ».
Selon un sondage de décembre 2020, la laïcité reste un point encore aveugle de la formation des agents publics. Par exemple, 11% des agents publics dans leur ensemble pensent qu’un agent peut porter des signes
religieux visibles dans l’exercice de ses fonctions ; chiffre qui monte à 14 % chez les contractuels et
autres statuts assimilés. Au regard du devoir d’exemplarité des agents publics figurant dans la loi de
déontologie, ces résultats appellent une réaction forte en termes de formation initiale et continue. Plus questionnant encore, 15 % seulement des agents déclarent avoir reçu une formation sur la laïcité depuis leur entrée dans la fonction publique, l’étiage (7 %) étant constaté dans la fonction publique hospitalière. De la même manière, 10 % seulement des contractuels déclarent avoir reçu une formation contre 17 % chez les fonctionnaires. Ce seuls indices sont suffisamment éloquents pour permettre de suspecter un découplage paradoxal entre degré d’approbation manifeste et la vérification d’une connaissance intériorisée des applications concrètes de la laïcité.
Concernant plus précisément la fonction publique hospitalière…
Alors que le respect du principe de laïcité a fait l’objet de plusieurs circulaires, guides à l’attention des établissements de la FPH (sanitaire et médico-social) et de leurs agents, en plus des instructions interministérielle, une enquête menée par la Fédération hospitalière de France auprès de ses adhérents en 2015, montre que des questions liées à la laïcité se posent fréquemment dans les établissements et que ceux-ci parviennent avec les outils à leur disposition à apporter dans la plupart des cas une réponse satisfaisante.
Cependant, à la demande de la direction générale de l’offre de soins (DGOS), une formation « laïcité, droits et obligations dans les établissements de la fonction publique hospitalières » a été déployée par l’Association
Nationale pour la Formation du personnel Hospitalier (ANFH) et inscrite en tant qu’action
prioritaire de formation nationale de 2017 à 2021. Force est de constater que malgré l’intérêt de cette formation, seule une infime partie des agents se sont mobilisés puisqu’au 31 décembre 2020, seules 43 sessions de 3 jours ont été réalisées pour seulement 500 agents. La DGOS estime qu’une formation courte (1 journée) abordant le respect de la laïcité sous le prisme de la sécurité des établissements et du risque lié à la radicalisation répond mieux aux besoins des personnels.
Dans le versant hospitalier, la mission préconise d’introduire un module « laïcité » dès la formation initiale des infirmiers et des aides-soignants.
La crise sanitaire qui dure depuis un an a entraîné un retard important dans nombre de formations « métiers » obligatoires. Afin de tenir compte de cette réalité, les rapporteurs proposent de bien cibler les publics prioritaires à cette formation. Voici leurs propositions :
• rendre obligatoire l’insertion des règles relatives à la laïcité et à la neutralité dans les règlements
intérieurs des établissements de soins ;
• pour la fonction publique hospitalière, prioriser la formation pour :
– les agents en lien avec le public
– les référents laïcité nommée dans les établissements
– les cadres de santé, avec les écoles des cadres qui peuvent intégrer un module laïcité obligatoire
– les internes en médecine.
• il pourrait également être utile, pour gérer en amont le flux des entrées dans la FPH, d’intégrer un
module laïcité dans l’ensemble des écoles de soins (IFSI/IFAS) ;
• l’ANFH étant répartie sur l’ensemble du territoire, lui confier le relai principal pour les formations
laïcité, avec un cahier des charges précis pour harmoniser celles-ci ;
• en lien avec l’ ANFH, développer, dans un cadre pluriannuel, une politique volontariste et déterminer
les bassins de vie dans lesquelles ses formations sont encore plus nécessaires.
La volonté du gouvernement de rendre obligatoire la formation des agents public au principe de laïcité peut se traduire concrètement par les propositions du rapport conciliant des mesures symboliques comme la transmission aux agents de l’article 25 de la loi de 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la nouvelle charte de la laïcité et le développement de formations communes aux trois fonctions publiques aussi bien pour les entrants que pour les agents déjà en poste. Plus largement, le projet de loi confortant les principes de la République consacre plus précisément le rôle des référents laïcité dans toutes les administrations publiques.
*L’Observatoire de la laïcité, commission consultative transpartisane créée à l’initiative du Président de la République Jacques Chirac en 2007, installée en 2013 par le Président de la République François Hollande, a vu son mandat renouvelé en 2017 par le Président de la République Emmanuel Macron et le Premier ministre Édouard Philippe.
• Rapport annuel de l’Observatoire de la laïcité 2019 – 2020.
• Rapport de la Mission flash visant à établir un dispositif de formation à la laïcité adapté aux missions et métiers exercés par tous les agents publics. 18 mai 2021.