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4/01
2023

Le café philo, un lieu pour soutenir l’empowerment

Dans cet hôpital de jour, un « Café philo » propose aux usagers de structurer leurs pensées, pour argumenter et défendre leur point de vue.

« L’homme est condamné à être libre », Jean-Paul Sartre ; « L’objet de la guerre, c’est la paix », Aristote ; « Commencez par changer en vous ce que vous voulez changer autour de vous », Gandhi… Chaque mardi, à l’hôpital de jour du Service de psychiatrie adulte de l’hôpital Simone-Veil (Cannes), le « Café philo », espace chaleureux et convivial, regroupe une dizaine de patients, pour des débats, animés par Sonia Gérard, psychologue clinicienne, docteure en psychologie.

Comment ce groupe a-t-il vu le jour ? Sonia Gérard anime depuis de nombreuses années un groupe de parole à l’HDJ. Parallèlement, en thèse de doctorat de philosophie depuis 2021, elle s’interroge sur les relations entre subjectivation et pouvoir, c’est-à-dire la façon dont un individu devient un sujet autonome face au pouvoir, qu’il soit politique, psychiatrique, familial… En partant de l’idée que les ateliers thérapeutiques peuvent aider les patients à se positionner comme sujet, elle émet l’hypothèse qu’un groupe de parole plus exigeant en termes de réflexion et de positionnement soutiendrait l’empowerment. Dans un premier temps, soutenue dans le projet par l’institution, elle propose aux patients une initiation à la philosophie : compréhension approfondie des mots, approche dialectique, débat/argumentation afin d’affirmer sa position en faveur ou contre une idée… Puis la réflexion s’appuie sur des citations. Ainsi est né le Café philo.

Lors de leur intégration au centre de jour, tous les patients sont informés de l’existence de cet atelier, auquel ils participent librement. L’équipe soignante évoque très régulièrement en réunion les bénéfices de ce groupe.

« Ici je me sens libre. Et j’ai les mots pour dire que partout ailleurs, je ne le suis pas. Que je ne l’ai jamais été… »
Véronique, usagère et participante du Café philo

Contrairement aux idées reçues, les usagers se montrent en capacité d’élaborer un point de vue et de le défendre. Et il n’est pas nécessaire d’avoir lu les grands auteurs pour faire de la philosophie, si on admet que cette discipline se nourrit de questionnements et d’étonnements. Les débats d’idées du Café philo favorisent le développement de dimensions souvent mises à mal par la maladie mais aussi le parcours psychiatrique : estime de soi, confiance en soi, représentation de soi et reconnaissance par les autres. Défendre son point de vue s’avère ainsi un outil de revalorisation narcissique et d’affirmation de soi.

L’enjeu sous-jacent est aussi d’agir en faveur de la déstigmatisation : l’usager prend conscience de ses capacités et apprend à se sentir légitime comme personne et citoyen. La société, elle, devrait réviser ses clichés…

• Contact : Sonia Gérard, s.GERARD@ch-cannes.fr