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17/05
2023

Une grille d’analyse de la Drees sur la situation des proches aidants

Quelle est la typologie des proches aidants de personnes vivant à leur domicile ? Quelles sont les grandes situations types rencontrées et les ordres de grandeur des effectifs des populations concernées ? Et pour quelles difficultés de vécu ? La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), en partenariat avec l’Institut des politiques publiques (IPP), propose une grille d’analyse pour mieux en rendre compte.

Chacun peut, à un moment ou à un autre de sa vie, être « proche aidant » c’est-à-dire apporter régulièrement une aide à un proche en raison de son état de santé, de son âge ou d’une situation de handicap. Une telle situation peut parfois être difficile pour l’aidant, affectant son organisation de vie et parfois sa santé. Les pouvoirs publics ont mis en place différentes mesures pour aider les proches aidants et ils continuent à réfléchir à de nouvelles actions dans le cadre d’une stratégie nationale démarrant en 2023, qui prend la suite de la stratégie nationale « Agir pour les aidants 2020-2022« 1.

Une typologie permettant de nourrir la réflexion sur les besoins d’aide des proches aidants

Les situations des proches aidants sont très diverses et les besoins d’aide publique des aidants le sont en conséquence. L’étude de la DREES propose une typologie des proches aidants de personnes vivant à leur domicile à partir des résultats de l’enquête Handicap-Santé réalisée par la DREES et l’Insee en 2008. L’objectif est de mettre au jour les grandes situations types, de rendre compte des différences de vécu de ces situations et de donner des ordres de grandeur des effectifs des populations concernées. Ces ordres de grandeur ont bien sûr vraisemblablement évolué et il sera possible d’apprécier prochainement les évolutions, dès que les résultats de l’enquête Autonomie réalisée par la DREES en 2022 seront disponibles. Les grandes situations types sont cependant vraisemblablement structurelles et peuvent d’ores et déjà être utiles pour cadrer les réflexions sur les besoins d’aide des proches aidants.

« Les aidants les plus impactés : conjoints, parents et enfants apportant une aide importante »

Trois grandes catégories de proches aidants selon la charge d’aide ressentie

La typologie est construite à partir d’un ensemble de caractéristiques objectives sur le profil des aidants et des aidés, les liens qui les unissent, le besoin d’aide des aidés et le degré d’implication des aidants. Bien qu’établie sur des critères factuels, cette typologie fait apparaître des groupes présentant de fortes disparités s’agissant du ressenti des aidants. Ces groupes sont ainsi présentés selon la charge ressentie des aidants, des plus impactés aux moins impactés. Dix groupes se répartissant en trois catégories émergent. Bien que la typologie soit établie uniquement sur des critères factuels, il s’avère que les dix groupes diffèrent fortement du point de vue de la charge ressentie par les aidants (impression que l’aide apportée les amène à faire des sacrifices, qu’elle affecte leur santé, les relations avec leur famille…). Quatre groupes se distinguent ainsi par une charge ressentie significativement plus forte que la moyenne. Ce sont des conjoints, des parents et des enfants qui assument une charge d’aide importante. Sur les 7,6 millions de proches aidants analysés2, ils représentent 1,8 million d’entre eux (24 %). La catégorie des proches aidants moyennement impactés regroupe des conjoints et des parents de personnes aidées ayant peu de limitations dans leur vie quotidienne, mais qu’ils sont seuls à aider. Sur les 7,6 millions de proches aidants, ils représentent 2,2 millions d’entre eux (29 %). Les cinq derniers groupes ont une charge ressentie significativement plus faible que la moyenne. Ce sont plus souvent des enfants, frères et sœurs, d’autres membres de la famille et d’autres personnes de l’entourage, rarement des conjoints, apportant une aide relativement moins importante. Ils représentent 3,6 millions d’aidants (47 %).

Groupe A : les aidants apportant 34 heures ou plus d’aide par semaine (482 000 aidants)
Groupe B : les aidants apportant de 20 à moins de 34 heures d’aide par semaine (435 000 aidants)
Groupe C : les parents aidant au quotidien un enfant de moins de 20 ans (392 000 aidants)
Groupe D : les aidants impliqués dans l’aide d’une personne ayant de nombreuses limitations (536 000 aidants

Une charge ressentie liée au nombre d’aides à la vie quotidienne et au volume d’heures d’aide par semaine

L’étude analyse également, grâce à une modélisation, le nombre de charges ressenties sur onze possibles, telles que le sentiment de ne pas avoir assez de temps pour soi, d’être amené à faire des sacrifices dans sa vie ou encore d’avoir l’impression que la situation affecte sa santé (graphique). 45 % des proches aidants ne déclarent pas de charge négative, 23 % déclarent une charge négative, tandis que 32 % déclarent deux charges négatives ou plus.

« Ce qui se joue le plus fortement sur le vécu : l’intensité et le temps d’aide, mais aussi le lien familial  »

A retenir - Toutes choses égales par ailleurs (âge de la personne aidée...), la charge ressentie de l’aide augmente logiquement en premier lieu avec le nombre d’aides à la vie quotidienne et le volume d’heures d’aide par semaine. Mais elle dépend significativement du lien entre l’aidant et l’aidé : elle est la plus élevée lorsque l’aidant est le parent de la personne aidée, puis lorsqu’il est son conjoint. Pour ces derniers, il peut être difficile de ne pas faire soi-même le plus possible pour son proche. Elle est la plus faible lorsque l’aidant est un autre membre de la famille ou un membre de l’entourage. La charge ressentie est plus forte quand l’aidant est une femme, quand il apporte une aide financière, quand il doit prendre seul les décisions ou qu’il est la personne de confiance. Elle est plus importante s’il existe un aidant professionnel avec la charge de devoir organiser son intervention. Elle augmente lorsque le proche aidant est en emploi ou étudiant, pour des raisons probables de conciliation. Elle diminue enfin lorsque l’aidant a la possibilité de se faire remplacer.

1- Lancée le 23 octobre 2019, la stratégie nationale de mobilisation et de soutien « Agir pour les aidants 2020-2022 » vise à répondre aux besoins quotidiens des proches aidants, notamment : la rupture de l’isolement, le soutien aux jeunes aidants, l’accès à de nouveaux droits sociaux, le renforcement de leur suivi médical, la mise en œuvre de solutions de répit, ainsi que la facilitation de leurs démarches administratives et de la conciliation entre vie privée et vie professionnelle.
2- Ces chiffres ne sont pas directement comparables avec ceux publiés récemment par la DREES (Blavet, 2023). Ces derniers s’appuient sur les réponses d’un échantillon représentatif de la population âgée de 5 ans ou plus résidant en France à la question « Apportez-vous une aide régulière à un proche en situation de handicap ou de perte d’autonomie vivant dans ce logement ou ailleurs ? ». Ils sont basés sur l’autodéclaration des personnes et englobent les proches aidants de personnes vivant en institution.

Les proches aidants : typologie d’une population hétérogène – Proposition de grille d ‘analyse pour rendre compte de la diversité des situations des proches aifants de personnes vivant à domicile et cerner celles dont le vécu est le plus difficile (PDF) -Thomas Blavet (DREES, Institut des Politiques Publiques, Paris School of Economics), Yann Caenen (DREES). Les dossiers de la DREES N° 110. Paru le 17/05/2023. Accéder également aux données de ce travail via un téléchargement du fichier xlsx.