Refondation du métier d’infirmière : c’est parti !
Lors de la clôture de la réunion plénière du Conseil national de la Refondation (CNR) Santé, le ministre de la Santé et de la Prévention François BRAUN a réaffirmé sa volonté que l’année 2023 soit une année charnière de la refondation du métier infirmier structurée autour de trois axes :
- Les compétences : passer d’un encadrement strict des actes autorisés à une approche plus agile par grandes missions ;
- La formation : repenser les cursus de formation pour les adapter aux besoins locaux, attirer toujours plus de jeunes et renforcer leur accompagnement jusqu’au diplôme ;
- Les carrières : rénover et renforcer les collectifs de travail au sein desquels ils exerceront des compétences élargies, en équipe, et verront leurs expertises reconnues dans une perspective de progression et d’évolution professionnelle
Pour réussir cette transformation inédite du métier d’infirmier, le ministre de la Santé et de la Prévention a tenu à présenter lors d’un séminaire plénier sa méthode et les premières pistes d’action pour co-construire avec les professionnels une formation rénovée ainsi qu’un cadre d’exercice modernisé dans les dix-huit prochains mois.
Les compétences : faire évoluer le cadre d’exercice
Le décret infirmier, concernant l’exercice de la profession et les actes professionnels, est ancien (1962). Sa dernière révision, date de 2004, et sa logique n’est plus adaptée à la réalité actuelle du métier ! Les tâches réalisées par les infirmiers sont de plus en plus techniques et diversifiées et Il est essentiel que le cadre de leur métier reflète mieux le dynamisme et la polyvalence de leur exercice. François Braun suggère : » pour les infirmiers et leurs patients, comme le préconise la mission IGAS-IGESR, nous passerons d’un encadrement strict des actes autorisés à une approche plus agile, autour de grandes missions. Je n’irai pas jusqu’à dire que c’est une révolution… mais c’est un vrai changement d’importance dans notre manière d’envisager le métier ». Il conviendra donc d’apporter des modifications d’ampleur sur le décret infirmier, particulièrement prescriptif, et essentiellement élaboré selon des listes d’actes. Les éléments de comparaison internationale sur la profession démontrent que des évolutions ambitieuses sont possibles, en particulier en raisonnant par grandes missions dévolues aux infirmiers et en sécurisant l’élargissement de leur champ de compétences par la formation et la collaboration avec le médecin. Ces évolutions seront concertées avec les parties prenantes, pour transformer le cadre d’exercice infirmier (prévention et éducation thérapeutique, coordination du parcours, soins de proximité, etc.) d’ici la rentrée 2024 prochaine.
Dors et déjà, la loi dite « Rist 2 » portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé et la loi de financement de la Sécurité sociale LFSS 2023 ouvrent de nouvelles perspectives aux infirmiers. La prise en charge des plaies chroniques en accès direct dans le cadre d’un exercice coordonné, l’extension de la compétence vaccinale à l’ensemble des vaccins du calendrier vaccinal (prescription et administration) et la réalisation des certificats de décès sous forme d’expérimentation dans 6 régions qui débutera dès cet été sont désormais autorisés pour cette profession.
Par ailleurs, la réussite des protocoles de coopération, qui permettent aux professionnels travaillant en équipe de réorganiser leurs interventions auprès des patients en procédant à des délégations de tâches, démontre la capacité du groupe infirmier à évoluer pour s’adapter aux besoins de santé et collaborer efficacement avec les différents professionnels de santé pour mieux répondre aux demandes de soins et de prévention. Ce contexte favorable à la profession permet par ailleurs de réfléchir à l’intégration de certains d’entre eux dans le droit commun, c’est le travail qui va être mené dès à présent.
« C’est une nécessité forte que d’investir durablement dans l’avenir de cette profession essentielle, pour maintenir nos forces vives, assurer leur équilibre professionnel et personnel, et inciter les plus jeunes à être toujours plus nombreux à les rejoindre ! »
François Braun
Une formation rénovée
Les évolutions sur l’exercice sont indissociables de celles de la formation. Afin de permettre à toujours plus de jeunes d’accéder et de réussir dans la formation infirmière, seront engagés :
- Une évolution de la formation dès la rentrée 2024 : contenus, ingénierie pédagogique, alternance et parcours de stages sont autant de thématiques qui feront l’objet de groupes de travail dédiés ;
- La lutte contre le décrochage et la sécurisation des parcours individuels, de la sélection à l’intégration professionnelle, est érigée en priorité pour que tous les étudiants qui ont choisi ce métier l’exercent. A cet égard, le ministre de la Santé et de la Prévention lancera dans les prochains jours, en lien avec le ministère de l’Enseignement supérieur, une mission pour continuer à faire évoluer le contenu de la plateforme Parcoursup en s’appuyant sur la concertation et les retours des utilisateurs. Parcoursup est un véritable outil de visibilité et d’accessibilité des formations, les études infirmières font partie du trio de tête des formations les plus demandées depuis l’ouverture de la plateforme en 2019.
- Un plan d’action global autour de la politique de stage sera construit avec les parties prenantes, personnalisable selon les besoins des territoires. Il engagera tous les acteurs dans une politique de tutorat volontariste et professionnalisante, définira les grands principes d’une démarche qualité basée sur l’expérience utilisateur et associera étroitement étudiants, élus et professionnels pour proposer des solutions en faveur de l’accompagnement des étudiants (hébergement notamment) et de la diversification des offres de stage.
Un travail sur les représentations professionnelles, les valeurs attendues pour partager ces métiers du soin et l’image du métier est à mener autour de projets qui seront menés dès le lycée :
- Le développement des cordées de la réussite par les IFSI, pour permettre aux lycéens les plus éloignés du système de s’autoriser à croire en leur potentiel et d’oser intégrer ces formations dès la rentrée 2023. François Braun précise : » je veux que d’ici la rentrée prochaine, nous ayons doublé le nombre d’IFSI impliqués dans une cordée pour la rentrée 2023, afin qu’ils deviennent des ambassadeurs auprès des autres IFSI, dans une dynamique d’émulation positive. Mon objectif est que, d’ici 2024, nous ayons réussi à achever l’adhésion d’au moins un IFSI par GHT dans une cordée, afin de couvrir l’ensemble du territoire ».
- En parallèle, le déploiement du mentorat comme levier professionnel d’émancipation de tous les jeunes, favorisant les regards croisés, consacré grande cause nationale 2023 par la Première ministre ;
- La diversification des modes d’entrée en formation à compter de septembre 2023 grâce à l’apprentissage proposé dès la première année et aux parcours réussite dédiés aux aides-soignants expérimentés, pour attirer de nouveaux étudiants, favoriser la diversité et valoriser les expériences antérieures.
Au total, ce sont plus de 38 000 futurs infirmiers qui feront leur rentrée dans les instituts en septembre prochain
Poursuivre l’universitarisation
L’universitarisation offre par ailleurs de nouvelles perspectives pour des enseignants chercheurs. Sur ce point, l’IGAS et l’IGESR rendront fin juin les conclusions d’une mission dédiée. François Braun affirme sa volonté de « travailler à des postes bi-appartenants, hospitaliers et universitaires, dans nos filières de sciences infirmières, de sciences de la rééducation et de maïeutique. J’y tiens parce que c’est, là encore, un facteur d’attractivité et une garantie d’excellence ! L’universitarisation, c’est un élan pour la recherche et l’innovation en sciences infirmières. Le métier d’infirmier est très riche. On connaît bien son aspect très professionnalisant, sur le terrain, auprès des patients. Il faut affirmer que l’expertise infirmière est aussi savante, et contribue pleinement au développement et à l’avancée des sciences de la santé ».
L’entrée dans la vie professionnelle
Le Ministre souhaite par ailleurs examiner prochainement au Parlement une disposition législative visant à interdire la pratique de l’intérim en sortie de formation afin de permettre aux jeunes infirmiers de commencer leur carrière dans un cadre stable et sécurisant d’un collectif de travail, nécessaire pour consolider leurs acquis.
Les carrières
François Braun précise enfin « que la troisième « brique » de la refondation de la profession concerne la dimension de carrière infirmière, à qui je veux donner une nouvelle impulsion ». Le métier infirmier est un métier d’avenir et il veut dessiner de nouvelles possibilités de progression et d’évolution professionnelle. Ainsi, le déploiement de la pratique avancée, qui est une priorité gouvernementale, se poursuit. Les IPA sont déjà près de 2 000 diplômés, devraient atteindre la barre des 5 000 IPA à échéance 2024.
Un pacte renouvelé avec les Régions pour former plus et mieux piloter
Après dix ans de gel des quotas, 6 093 places supplémentaires ont été ouvertes dans les formations infirmières depuis 2020, soit une hausse de 18 %, dont les premiers effets seront ressentis dès l’année prochaine sur le système de santé.
En concertation avec la commission santé de Régions de France, le ministre de la Santé et de la Prévention a convenu de lancer, début juin, un comité de suivi permettant de faire le bilan de ces travaux. En parallèle, d’ici à septembre, il souhaite avancer grâce aux travaux de l’Observatoire National de la Démographie des Professions de Santé (ONDPS) sur la structuration d’un pilotage national et territorialisé des besoins en formation, en fonction des besoins de santé de la population. Des comités stratégiques associant les régions, les élus, les ARS, les établissements de santé et les instituts de formation pourront travailler à la définition de leurs projets locaux, proposer des expérimentations, et anticiper leurs augmentations capacitaires sur la base des projections démographiques de l’ONDPS.
Une concertation des parties prenantes et une méthode de co-construction
Pour rendre possible cette transformation inédite du métier d’infirmier, le ministre de la Santé et de la Prévention souhaite donner la parole aux acteurs pour qu’ils s’approprient pleinement la démarche et soient les principaux porteurs des changements.
A ce titre, seront lancés :
- Une campagne d’information dynamique ;
- Trois grandes consultations nationales auprès des infirmiers, des étudiants et des patients sur l’année 2023 pour recueillir les avis et envies des parties prenantes ;
- Des concertations régulières avec les organisations syndicales représentatives de la fonction publique hospitalière et des infirmiers libéraux conventionnés ;
- Des consultations et de la co-construction avec les acteurs institutionnels, les Régions et l’ensemble des élus, les Agences régionales de santé (ARS), les employeurs ;
- La constitution de plusieurs « groupes témoins », composés de professionnels, d’étudiants, de patients, qui seront en interaction avec les groupes de travail.
Ces travaux s’inscrivent dans un travail conduit en interministériel pour un nouvel engagement en faveur de l’attractivité des métiers du soin.