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1/07
2025

« Une lueur d’espoir » dans le déploiement des IPA en psychiatrie

Dressant l’état des lieux d’une discipline psychiatrique « saturée » et en grand déficit d’attractivité, une mission d’information sénatoriale propose une vingtaine de recommandations pour améliorer l’accès aux soins. Les compétences élargies des infirmiers en pratiques avancées psychiatrie et santé mentale (IPA PSM) « en font des professionnels précieux pour tous les lieux de prise en charge ».

Réduire les inégalités territoriales d’accès aux soins psychiques, garantir une prise en charge graduée grâce à la mobilisation de tous les acteurs : une vingtaine de recommandations pour répondre à ces enjeux ont été adoptées par la Commission des affaires sociales du Sénat le 25 juin, selon la synthèse d’un rapport à paraître prochainement. Trois ans après la fin de crise sanitaire, une mission d’information, rapportée par Jean Sol (Les Républicains), Daniel Chasseing (Les Indépendants – République et Territoires) et Céline Brulin (Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky), constate que « la dégradation de la santé mentale est une tendance de fond » et s’inquiète « de l’explosion des troubles psychiques chez les jeunes ». Soulignant qu’il ne peut y avoir de « grande cause sans grands moyens », elle s’attache à définir les priorités d’action et les réorganisations de l’offre. Les déploiement des infirmiers en pratique avancée spécialisés en psychiatrie et santé mentale (IPA PSM) est évoqué à plusieurs reprises comme représentant un levier d’amélioration.

Dépister, destigmatiser, orienter…

Au premier niveau de prise en charge par exemple, la recommandation n°4 propose de « développer les consultations avancées assurées par les IPA PSM au sein des maisons de santé pluriprofessionnelles et des centres de santé. » Plus globalement, il s’agit d’améliorer la réponse apportée par les acteurs de soins de ville et les médecins généralistes, infirmiers et psychiatres doivent y coopérer davantage.

Les parlementaires soulignent également que d’autres professions au contact des publics vulnérables peuvent jouer un rôle dans la détection des troubles psychiques et l’orientation vers le soin : travailleurs sociaux, forces de l’ordre ou encore enseignants. La formation aux premiers secours en santé mentale (PSSM) doit être renforcée, d’abord à « toutes les professions clés puis à l’ensemble des citoyens » (recommandation 6).

Les rapporteurs sont également convaincus que la pair-aidance doit être encouragée, compte tenu de ses résultats prometteurs en matière de prévention et de réinsertion socio-professionnelle.

Une politique globale peu lisible ?

Les rapporteurs portent un regard plutôt positif sur la feuille de route « santé mentale et psychiatrie » du Gouvernement, lancée en 2018, « qui témoigne d’une réelle prise de conscience ». Les financements, mobilisés en parallèle, sont également à saluer, même s’ils ne suffisent pas à répondre à l’explosion de la demande de soins psychiatriques. Cependant, la mission regrette un « empilement de programmes, de plans » et estime que la politique nationale de santé mentale se heurte à au moins trois écueils :
– l’ajout de nouvelles mesures sans toujours de déclinaison des actions sur le terrain crée des déceptions de la part de la population comme des soignants ;
– l’insuffisance de certains axes majeurs intégrés à la feuille de route comme la question de l’attractivité des métiers ;
– le risque de voir la psychiatrie « noyée dans les enjeux globaux de santé mentale, comme le craignent les soignants ».

Répondre au mal-être de la psychiatrie

Selon les Sénateurs, le système de prise en charge est embolisé et caractérisé par de fortes inégalités territoriales. La synthèse présente un état des lieux connu : les Centres médico-psychologiques [CMP], pierre angulaire du système de prise en charge en psychiatrie, sont « embolisés » et peinent à accomplir toutes les missions qui leur incombent, notamment en matière de prévention et de suivi à domicile ; les hôpitaux psychiatriques et les services d’urgence sont saturés, peinent à recruter…

Dans ce contexte, le déploiement d’IPA PSM représente une « lueur d’espoir »« À rebours de certaines réticences, les rapporteurs ont constaté qu’un large consensus prévalait dans le corps médical, et notamment chez les psychiatres, quant à la plus-value des IPA mention PSM. Il convient dès lors d’encourager leur recrutement dans les services psychiatriques, les CMP mais, également, au sein de l’éducation nationale ou de l’ASE puisque cette possibilité a récemment été ouverte par la loi. » Deux recommandations s’intéressent à améliorer les conditions de rémunération.

Sur le plan des moyens, il est indispensable d’allouer plus de personnel médical et non médical aux CMP, en priorisant les territoires les plus en tension et les CMP infanto-juvéniles. Le renfort en IPA PSM serait là encore particulièrement utile. Sur le plan organisationnel, il est nécessaire de « conforter le rôle du CMP comme porte d’entrée dans le parcours de soins, et de clarifier le niveau de compétence des nombreux acteurs susceptibles d’intervenir auprès des patients. En effet, la multitude d’acteurs nuit à l’efficacité de l’offre de soins : celle-ci est jugée hétérogène et illisible, le parcours est complexe et fréquemment constitué de ruptures de suivi. »

Le rapport veut aussi favoriser autant que possible « les interventions à domicile », et l’aller vers. Les dispositifs d’équipe mobile présentent des résultats concluants pour prévenir les hospitalisations, éviter les ruptures de prise en charge et assurer l’observance des traitements par les patients.

Réunie le mercredi 25 juin 2025 sous la présidence de Philippe Mouiller, la commission des affaires sociales a adopté le rapport et les recommandations présentés par Jean Sol, Daniel Chasseing et Céline Brulin, rapporteurs, et en a autorisé la publication sous forme d’un rapport d’information.

• Santé mentale et psychiatrie : pas de « grande cause » sans grands moyens, Rapport d’informations n° 787 (2024-2025), adopté le 25 juin 2025, à paraître. Voir la synthèse dans « L’essentiel » du 25 juin en pdf.