(Re)prendre le temps du soin
« On n’a pas le temps ! », c’est toujours : « Je n’ai pas de temps pour… vous » ! Pour que la parole du patient soit entendue, qu’elle trouve sa place et fasse « événement » sur le plan clinique, il faut permettre à la personne qui souffre de se raconter et d’élaborer son histoire. Des organisations choisissent ainsi de s’appuyer sur les nouveaux « métiers du soin » (pratique avancée, coopération…) pour accroitre l’hospitalité et permettre aux soignants de « passer du temps avec les patients ». D’autres parient sur le déploiement de l’Intelligence artificielle en santé (aide à la décision, automatisation de tâches administratives, guidage des patients à travers les procédures administratives…) pour permettre aux soignants de réinvestir la rencontre… Autant d’espaces de « respiration » qui peuvent redonner au professionnel le plaisir de soigner et de tisser de l’exceptionnel…
– « Coopération », « pratique avancée », le temps de la délégation (l’exemple des urgences du Vinatier), Brian LEVOIVENEL, Cadre supérieur de santé au Pôle Est, Responsable du déploiement des protocoles de coopération et de l’Evidence Based Nursing et Tamara VERNET, Infirmière en pratique avancée en suicidologie, Pôle urgence, CH le Vinatier.
Pour (re)prendre du temps avec les patients, il faut aussi réorganiser les soins, notamment en intégrant les nouveaux professionnels de santé infirmiers. Dans ce contexte, les responsables des urgences psychiatriques du Vinatier, confrontés à la pression de l’activité, aux difficultés d’accès aux soins, de recrutement et de fidélisation des agents, ont choisi de déployer une consultation infirmière autonome via un protocole de coopération afin de mieux répondre à la demande. L’étude d’un cas clinique permettra d’en mesurer les bénéfices. En parallèle, une vingtaine d’infirmièr.e.s du Vinatier ont décidé de se donner le temps de s’engager dans une formation d’infirmièr.e.s en pratique avancée (IPA). Dernièrement, une infirmière en pratique avancée (IPA) a également rejoint le pôle des urgences sur un poste dédié à la suicidologie. La clinique infirmière peut ainsi se déployer en fonction des attributions et des compétences de chacun. Présentation d’une stratégie institutionnelle audacieuse basée sur la collaboration.
– L’intelligence artificielle pour réinvestir la rencontre ? Stéphane MOUCHABAC, Psychiatre, hôpital Saint-Antoine Paris (Département médico-universitaire neurosciences, AP-HP 6.0), Chercheur à l’ICRIN Psy innovation de l’Institut du cerveau et de la moelle à Paris, Codirecteur de la section E-santé de l’Association française de psychiatrie biologique et de neuropsychopharmacologie (AFPBN)
Les grandes révolutions technologiques, comme la machine à vapeur et l’électricité, ont transformé notre rapport au temps et à la productivité. En médecine, il s’agit plutôt de potentialiser les soins. L’intelligence artificielle (IA) en santé mentale suit cette logique, non pour remplacer, mais pour « augmenter » les capacités des soignants. En automatisant les tâches répétitives et fastidieuses (gestion des dossiers, administration, analyses de données ou recueil automatisé de symptômes cliniques) l’IA peut libérer du temps pour permettre aux soignants de se concentrer sur l’écoute et la relation thérapeutique, tout en bénéficiant d’aides à la décision clinique basées sur des données vastes et précises.
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